C’est Inouï … ou pas !

1 juin 2017

La SNCF décide de rebaptiser ses TGV à la marque InOui … et c’est la curée sur les médias sociaux : sur Twitter, le #InOui distille des commentaires moqueurs du style : « #InOUI Pour l’instant c’est plutôt « A nous de vous faire préférer l’avion » » ou « ben moi je trouve que ça lui va bien, au #TGV #InOUI !! pannes, retards à répétition, ouais, cool, c bien lui : INOUI!! du jamais vu ! ».

Une opération marketing mal planifié ? Certainement ! Mais surtout un changement de nom non acceptable sous cette forme à l’heure des médias sociaux.

La marque TGV s’inscrit profondément dans l’inconscient collectif des Français puisque les premières recherches pour un train à grand vitesse capable de rivaliser avec le Shinkansen japonais datent du milieu des années, pour une mise en service 15 ans plus tard en 1981.

La marque TGV n’appartient donc pas vraiment à son propriétaire, la SNCF – qui pourtant en a assuré tous les développements – mais à tous les Français … et cela depuis bien avant les médias sociaux.

Ce que ces derniers ont changé, c’est la capacité des internautes à faire plier les marques – et surtout les marques qu’ils aiment. Un exemple parmi d’autres, le bras de fer opposant il y a un peu plus de 10 ans Coca Cola aux deux fondateurs du site farfelu américain EepyBird.

Stephen et Fritz découvrent en 2005 l’étrange réaction produite par l’introduction de bonbons de Mentos dans des bouteilles de Coca : de magnifiques geysers ; amusés, ils lancent in petto des concours de geysers et publient les meilleurs vidéos sur leur site, puis sur Youtube.

Si la marque Mentos, totalement inconnue aux Etats Unis, se montre particulièrement enthousiaste de cette publicité gratuite, la firme d’Atlanta préfère … ignorer un phénomène dont l’ampleur dépasse toutes les espérances d’EepyBird ; pourtant quelque temps plus tard, elle prendra le train en marche en s’associant à de nouveaux challenges.

Les marques ne sont pas pieds et poings liés face à la bronca de consommateurs réactionnaires qui leur dénieraient tout droit au changement. Quand en 2011, Starbucks annonce sur sa page Facebook son intention de supprimer les mots « Starbucks » et « Coffee » de son logo, les habitués de la chaîne crient au scandale.

Ce qui n’empêche pas le géant américain de procéder au toilettage annoncé à la date initialement prévue, sans plus de problèmes que ça : l’opération était stratégique pour lui, son positionnement étant de vendre plus en certain art de vie que simplement du café.

Un art de vie qui passe désormais par une relation privilégiée avec sa clientèle la plus fidèle qui peut participer aux évolutions de son offre : chacun peut proposer de nouveaux produits et très régulièrement, ceux qui recueillent le plus de suffrages sont commercialisés en test.

Le cas de la SNCF est totalement différent : les socionautes lui reprochent en vrac une politique tarifaire élitiste, cherchant à privilégier les clients les plus fortunés au détriment des autres ; un désintérêt grandissant pour les lignes régionales dont le matériel vétuste multiplie les pannes ; et bien évidemment des retards à répétition, liées notamment à ces pannes.

La SNCF ne possède pas le capital de sympathie d’un Starbucks : premier caillou dans la chaussure ; par ailleurs, le timing n’est pas des plus favorables.

Pour l’entreprise ferroviaire, il est cohérent, après la création Ouigo et le redéploiement complet de son offre ; les usagers y voient la confirmation de leurs craintes, après l’annonce de la disparition d’iDTGV fin 2017

Stratégie d’entreprise versus réalité des médias sociaux ? Politique marketing versus vécu des consommateurs ? Ne les opposons pas trop vite : car le marketing ne passe-t-il pas nécessairement par une écoute attentive de ses consommateurs ?

Une erreur marketing inouïe, alors ?

Aller plus loin…

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