Mi-avril, Facebook annonçait le déploiement public d’Instant Articles. Si certains y voient une fonctionnalité parmi tant d’autres, il se pourrait pourtant qu’elle marque un tournant majeur dans les stratégies de content marketing des marques.
Bienvenue dans l’ère du « Distributed Content »
Les lignes bougent, les usages changent. C’est encore plus vrai dans la circulation d’informations. Depuis quelques années, les moteurs de recherche et les médias sociaux tendent à se substituer aux sites web d’éditeurs médias pour diffuser (et partager en masse !) les dernières news mises en ligne.
L’étape suivante n’était plus qu’une question de temps : pourquoi servir uniquement de canal pour partager des liens, quand vous pouvez pousser vous-même les éditeurs à publier leur contenu directement via votre plate-forme ? Le cheminement est simple : les contenus créent des habitudes, les habitudes amènent les internautes à revenir sur votre plateforme, où se crée alors l’engagement. Et l’engagement, n’est-ce pas le Graal des réseaux sociaux, en quête permanente de monétisation de leurs services ? La boucle est belle et bien bouclée.
Forts de ce constat, les GAFA, ces géants de la Silicon Valley, multiplient les initiatives : Apple News, Google AMP, Linkedin Pulse, ou même Twitter « Beyond 10K »… Tous se rêvent désormais en éditeurs de contenus.
Dans ce nouveau paysage, Facebook Instant Articles ne fait pas figure de précurseur. Pourtant, il est le réseau qui pourrait bien marquer un tournant. La raison ? Son audience gigantissime, véritable nerf de la guerre. Car le réseau créé par Mark Zuckerberg représente à lui tout seul 1,59 milliard d’utilisateurs actifs dans le monde. Il est en capacité de démocratiser de nouveaux usages, à très grande échelle et à très grande vitesse. D’autant que Facebook n’est jamais à la traîne en terme de prouesses technologiques.
Cherche expérience optimisée pour engagement démultiplié
Interface responsive, vidéos autoplay, voix de l’auteur sous-titrée, photos en haute résolution, plans 3D, formulaires…Les Instant Articles offrent aux producteurs de contenus tout un panel d’outils pour optimiser et enrichir considérablement leurs articles sur mobile. Côté lecteur, c’est une expérience immersive unique et intuitive qui se crée sous leurs yeux : ils peuvent « liker », commenter (même les photos et vidéos) ou encore partager des extraits de texte. Avec plus d’un milliard d’utilisateurs, tout contenu publié devient susceptible d’engager une (très) large audience. Pour certains content managers, c’est tout simplement un rêve qui se réalise !
Mais ce n’est pas tout. Car au-delà du milliard (et demi) d’utilisateurs, Facebook dispose d’un autre atout poids lourd : son algorithme. Grâce à lui, voilà qu’apparaissent dans le fil d’actualité des utilisateurs des articles ciblés et adaptés à leurs goûts. Avec l’arrivée des Instant Articles, au lieu d’écrire pour Google, les marques vont se mettre à écrire pour le « News Feed Ranking Algorithm » de Facebook, et toucher leur cœur de cible sans aucun mal.
Grâce aux possibilités d’analyse du ROI, les marques pourront alors choisir d’utiliser les Instant Articles de Facebook aussi bien pour développer leur notoriété, générer des leads ou booster les ventes via le canal mobile. En fonction de leurs objectifs, les marques les plus créatives sauront utiliser les Instant Articles pour démultiplier la visibilité des contenus qui alimentent le « top of the funnel » (le haut de l’entonnoir, comme on dit) ou plutôt attirer les lecteurs vers leurs landing pages et pages produits, via des calls-to-action intelligents.
Vers des équipes dédiées à la distribution sociale
Cette nouvelle fonctionnalité de Facebook s’annonce-t-elle comme incontournable ? La réponse est assez simple : oui, et il faut s’y préparer. Preuve que le concept est en train de s’ancrer durablement, Buzzfeed à annoncé la création en août dernier d’une nouvelle équipe appelée BuzzFeed Distributed – soit 20 employés chargés de créer du contenu original, uniquement à destination de plateformes telles que Tumblr, Imgur, Instagram, Snapchat, Facebook etc.
En d’autres termes, une équipe de personnes produisant des contenus qui ne seront jamais publiés sur Buzzfeed.com, mais sur les réseaux sociaux.
Ce que les marques doivent retenir, c’est que la valeur ajoutée se joue dorénavant grâce à des équipes suffisamment spécialisées pour segmenter leurs contenus en fonction des audiences et des canaux. Il ne s’agit plus de proposer du contenu dupliqué sur ces plateformes, mais bien de créer des contenus répondant aux spécificités et aux codes des réseaux sociaux : courts, mobile-friendly et enrichis (vidéos, infographies, images).
Etre ou ne pas être libre… de choisir son message
Reste une interrogation de taille : la « facebookisation » des contenus ne pourrait-elle pas – à long terme – nuire aux marques ?
La question de l’indépendance des éditeurs a par ailleurs été souvent évoquée depuis l’annonce de l’arrivée officielle des Instant Articles en mai 2015, quand ceux-ci n’accueillaient encore que les contenus de partenaires médias.
Y penser est légitime : plus la consommation d’information migre vers les médias sociaux, plus les médias traditionnels perdent de l’audience au profit des géants du web social… Et plus le phénomène de dépendance s’installe.
Les Américains utilisent la terminologie de « walled gardens » pour désigner le futur des réseaux sociaux, qui pourrait se traduire par des espaces clos, ou l’essor de l’engagement privatisé. Bien sûr, cela constitue un risque pour les marques qui peuvent perdre le contrôle.
Mais si la question d’une indépendance relative mérite d’être posée, est-elle pour autant un frein ? Car on le sait : le meilleur moyen d’atteindre son audience est encore d’aller là où elle se trouve. Alors si votre audience devient accro aux Instant Articles, foncez !