Question a priori stupide, le Growth Hacking (= littéralement « bidouiller la croissance ») renvoyant à des techniques marketing destinées à accélérer rapidement et significativement la croissance d’une startup.
Or Donald Trump ne saurait s’apparenter à une startup (économiquement son empire semblerait même plutôt « old fashion »), pas plus qu’il ne chercherait la croissance – il ne souhaitait que devenir Président !
Par contre, comme beaucoup d’adeptes du Growth Hacking, pour gagner la pri-maire républicaine, puis l’élection présidentielle, il aura (presque) tout tenté …
Les storytellers font remonter le Growth Hacking au coup (de maître, s’il en est) qui a propulsé Airbnb en tête des sites de locations entre particuliers : alors qu’elle peinait à se développer, ses dirigeants ont eu l’idée de diffuser ses annonces sur Craiglist – site de petites annonces leader aux Etats Unis, le Bon Coin américain.
Peut-être pas totalement honnête, mais en tous cas efficace !
Une autre startup vient également à l’esprit quand on parle de Growth Hacking : Uber ; au départ, de manière soft, en offrant à tout nouvel utilisateur venant sur recommandation et à son parrain, un crédit pour leurs futurs achats.
Le problème, c’est la suite … C’est-à-dire la gestion ultérieure des acquis.
Airbnb, après une période tendue avec les hôteliers, et surtout les autorités lo-cales, s’est assagie : aujourd’hui, elle collecte même les taxes de séjour pour le compte des villes avec lesquelles elle a signé des accords.
Uber continue un développement plus sulfureux, entretenant des particulière-ment aigres, tant avec ses chauffeurs – qui ne sont qu’un mal passager, Uber visant un modèle totalement automatisé sans conducteurs – qu’avec les diverses administrations, voire les tribunaux – y compris en Californie où ses chauffeurs ont été considéré comme des employés par un juge local !
Mutatis mutandis, puisque Donald Trump ne cherchait pas la croissance mais à gagner une élection – mais comme Airbnb ou Uber, il s’agissait bien de battre ses compétiteurs au poteau – on pourrait considérer que l’homme d’affaires américain ne faisait pas vraiment du Growth Hacking mais juste une caricature de Growth Hacking.
En Growth Hacking, tous les coups semblent permis, mais dans le (plus ou moins juste) respect des lois, ou du mois d’une certaine éthique : quand Airbnb détourne les internautes de Craiglist, c’est limite … mais ça passe.
Quand Uber casse le prix de ses courses sur le dos de ses chauffeurs indépen-dants, on sort des clous : rien d’illégal au sens propre du terme – puisque le loi n’existe pas vraiment … – mais d’un point de vue éthique, on a déjà vu mieux.
Quand Donald Trump annonce avant l’élection qu’il va construire un mur entre les Etats Unis et le Mexique ou qu’il va interdire l’entrée sur le territoire améri-cains de personnes originaires de certains pays, il recrute de manière désordonnée des électeurs … comme Uber recrute des clients !
Le problème, c’est qu’après l’élection, il continue à faire du Growth Hacking – ou plus évidemment, une caricature de Growth Hacking … alors que ce n’est plus nécessaire – là où un Airbnb commence à se ranger : on ne gère pas un pays – ou une société – en faisant des « coups ».
Alors, Growth Hacking et politique totalement incompatibles ?
Une fois élu, mieux vaut sans doute éviter : mais avant ? Peut-on recruter des électeurs de manière originale, tout comme une marque recrute de nouveaux clients ?
Si le Growth Hacking, c’est de trouver des méthodes innovantes pour séduire des électeurs, il ne semble pas incompatible avec le marketing politique, bien au contraire : d’ailleurs, Barack Obama l’a fait dès 2007, en recrutant un Chris Hughes tout juste âgé de 24 ans et cofondateur de Facebook, pour communiquer sur des médias sociaux auxquels personne ne pensait, avec le succès que l’on sait.
Mais à l’époque, on ne parlait pas encore de Growth Hacking !
PS : pourquoi une photo de chaton pour illustrer ce papier ? Parce que si vous en avez assez de voir partout sur la toile la photo de Donald Trump, il vous suffit d’ajouter à Google Chrome l’extension Make America Kittens Again qui remplace la photo du président américain par de gentils chatons ; en option, ça marche aussi pour Marine Le Pen.